“Aujourd’hui, nous formons, par exemple, dans nos universités de droit, des juristes qui ne parlent bien ni l’arabe ni le français. Ni ne connaissent le droit en arabe comme en français.” C’est le constat établi dernièrement par le premier magistrat du pays qui relève une réalité bien amère, celle du niveau de nos magistrats.
Des magistrats, qui n’ont pas cessé de dénoncer la justice nocturne en Algérie et ceux qui la cautionnent, ont manifesté un soulagement quant aux dernières déclarations du président de la République où il avoua le faible niveau de formation de nos juristes et magistrats. Ce constat, qui intervient au moment où la justice passe sa septième année de la réforme, pourrait remettre en cause, selon les spécialistes, tout un fonctionnement et une politique adoptée depuis plus de sept ans où les slogans faisant part d’une réforme qualitative de la justice n’ont pas cessé d’être ressassés. A cet effet, les magistrats interpellent le président de la République pour l’application de l’article 87 du statut de la magistrature qui stipule que «le magistrat qui, sans avoir commis des fautes professionnelles justifiant des actions disciplinaires, fait preuve d’inaptitude professionnelle ou de méconnaissance manifeste de droits, peut soit être affecté à un poste approprié, soit être admis à faire valoir ses droits à la retraite ou licencié après délibération du CSM. Dans ce cas, il bénéficie de garanties et procédures prévues devant le CSM dans sa formation disciplinaire». Par ailleurs, les délits commis par les magistrats se multiplient. Dernièrement, le ministre de la Justice, garde des Sceaux n’a pas manqué de dire que ses magistrats ont commis des fautes qu’il faudrait rectifier s’agissant notamment de la libération de terroristes détenus dans le cadre du dispositif mis pour l’application de la charte pour la paix et la réconciliation nationale. Serait-ce une incompréhension des textes ou une mauvaise application ? Le fait tout de même reste grave, car si les magistrats à qui incombent la responsabilité de faire appliquer les lois ne les comprennent pas, l’objectif visé par la réforme de la justice, celui de renouer avec la confiance des justiciables, reste loin à atteindre. Il est cependant impératif de rappeler que lors du discours prononcé le 23 août dernier, date de l’installation officielle du CSM, le président de la République n’avait pas manqué de souligner qu’«il est nécessaire de réviser la composition, le fonctionnement et les attributions du Conseil supérieur de la magistrature en vue de consacrer les principes de la Constitution afin de promouvoir le secteur de la justice». La réforme de la justice implique l’amélioration du niveau des magistrats et la formation continue doivent être assurées. «Le code de déontologie est devenu plus que nécessaire, voire urgent, car plusieurs dépassements ont été enregistrés”, souligne-t-on. Plus d’une quarantaine de magistrats sont passés devant la commission de discipline en 2005 pour manquement au droit de réserve, corruption et même mauvaise fréquentation. A ces reproches, s’ajoute maintenant l’ignorance des lois.